Julia Guillemot : « Je pense que tout est possible à qui rêve, ose, travaille et n’abandonne jamais » – Xavier Dolan
International et multiculturel, engagé et tourné vers les nouvelles technologies : voici comment nous pourrions résumer le parcours de Julia Guillemot, diplômée de l’IÉSEG en 2021.
Le temps d’une interview, elle nous a partagé son expérience à Harvard et à Shanghai, son engagement pour l’éducation au développement durable et sa passion pour l’éthique de l’Intelligence Artificielle.
Des États-Unis à la Chine, votre parcours est par essence international. Comment a-t-il commencé ?
Je suis partie dès ma deuxième année à Fairleigh Dickinson University, à quelques kilomètres de New York. Ce premier échange m’a énormément apporté, j’ai eu l’occasion de suivre des cours pointus et de découvrir mon intérêt pour les relations internationales lors d’une conférence sur la politique étrangère américaine à West Point, la plus prestigieuse école militaire des États-Unis.
Vous devenez ensuite la première étudiante de l’IÉSEG admise à Harvard, pouvez-vous nous en dire plus sur ce parcours ?
De retour à l’IÉSEG pour ma troisième année je découvre par hasard que l’IÉSEG venait d’ouvrir, dans son cadre de son nouveau Programme d’Excellence, les candidatures pour partir en tant que Visiting Student à Harvard University. Je décide de tenter l’aventure avec une phrase en tête : « It’s too big not to try ». Je me lance alors dans un parcours effréné en parallèle de mes cours à l’IÉSEG et de mon travail en start-up pour préparer tous les éléments du dossier de candidature. Pendant ce processus, je suis accompagnée par l’équipe des relations internationales de l’IÉSEG que je ne pourrais jamais assez remercier pour leur confiance, leur bienveillance et pour cette opportunité extraordinaire.
Un matin de mai 2017 je découvre en me réveillant un courrier d’Harvard, et c’est avec beaucoup de joie que je réalise que tout ce travail avait porté ses fruits et que ce rêve allait se réaliser.
A Harvard, vous découvrez un autre univers ?
Les premières semaines, il nous arrivait souvent de nous regarder avec incrédulité avec ma colocataire lorsque nous traversions le campus. Le rythme soutenu des cours et du travail personnel a ensuite pris le dessus, mais le quotidien était d’une richesse incroyable. Durant une même journée, je pouvais passer plusieurs heures à la bibliothèque, aller en cours, rencontrer un ancien Premier Ministre français pour 2h de conversations off-record, et chanter avec 50 choristes et un orchestre professionnel le soir.
Cette année fut extrêmement riche aussi bien humainement qu’académiquement, ayant choisi de prendre des cours de Computer Science, de philosophie chinoise, d’histoire et de moralité de l’Intelligence Artificielle. Je garde de très bon souvenirs de toutes les heures passées à échanger, débattre et apprendre avec les autres étudiants, tous passionnés et venant d’horizons différents.
Julia Guillemot, vous choisissez ensuite Shanghai pour votre échange de master, pourquoi la Chine ?
J’ai depuis toujours été fascinée par la Chine, tant par la beauté et la richesse de sa culture millénaire que par son influence et évolution actuelle, et notamment le développement unique de son écosystème digital. Dans le cadre de mon Master of Science in Management, spécialisation Finance, je suis donc partie en 2019 à la Shanghaï Advanced Institute of Finance. En parallèle de mes cours de finance, j’ai également eu l’occasion d’approfondir mes connaissances en programmation, en machine learning et en Intelligence Artificielle.
Comment êtes-vous venue à vous intéresser à l’intelligence artificielle ?
J’ai été très frappée de l’impact des algorithmes qui gouvernent les réseaux sociaux lors du référendum du Brexit en 2016. Cela m’a amené à questionner le rôle que ces algorithmes pouvaient avoir sur nos vies et a débuté mon intérêt pour l’IA. A la suite de mes cours à Harvard et Shanghai j’ai souhaité continuer à approfondir ce sujet en écrivant mon mémoire de fin d’études sur l’Éthique de l’Intelligence Artificielle. Plus précisément, je me suis intéressée à l’intégration des préoccupations éthiques dans le développement et le déploiement de systèmes d’intelligence artificielle au sein des entreprises technologiques. C’est un sujet qui continue de me passionner et j’ai depuis lancé plusieurs projets, dont un réseau de jeunes professionnels, le « Better Tech Network ».
L’engagement, c’est le troisième trait distinctif de votre parcours. En parallèle de vos études, vous lancez un programme mondial pour l’éducation au développement durable. Comment cette aventure a-t-elle commencée ?
En 2017, je rencontre les co-fondateurs de la start-up Pixis, une start-up d’orientation scolaire qui a pour but d’aider chaque jeune à trouver sa voie, à trouver les diplômes adaptés et à s’orienter professionnellement en fonction des 17 objectifs de développement durable de l’ONU. Très alignée avec leur vision, je les rejoints d’abord à mi-temps, puis lors de mon stage de troisième année. Le CEO me présente alors le réseau SDSN, rattaché aux Nations-Unies, et l’initiative « Global Schools », que je rejoins à ses débuts en tant que Project Officer.
Pouvez-vous nous en dire plus sur Global Schools et sur votre rôle au sein de l’ONG?
Global Schools est née d’un constat simple : si nous voulons atteindre les objectifs de développement durable, nous devons former la nouvelle génération à ces enjeux, et avec les mots de Nelson Mandela : « Education is the most powerful weapon to change the world ». Global Schools a pour but d’équiper les professeurs et les écoles avec les outils pour enseigner le Développement Durable dans les écoles primaires et secondaires, partout dans le monde.
Dès 2017, nous nous sommes donné un objectif très ambitieux : toucher un million d’élèves en trois ans. Nous étions à l’époque une équipe de 4 volontaires, répartis partout dans le monde, disposant d’un budget virtuellement inexistant. J’ai débuté en tant que Project Officer, avant d’être nommée à la tête de Global Schools en 2019, où je gérais alors une équipe de 17 personnes et 500 volontaires.
Un million d’élèves ? Comment toucher un million d’élèves ?
Nous avons commencé par créer une bibliothèque de ressources pour les professeurs, et travaillé avec un professeur d’Harvard pour rassembler un contenu de grande qualité, disponible en sept langues et adaptable quel que soit le pays, pour les élèves de la maternelle à la terminale. Ensuite, nous avons recruté un réseau de 100 ambassadeurs dans 29 pays, que nous avons formés pendant six mois, avant de les envoyer à la rencontre des professeurs et directeurs d’écoles pour améliorer l’enseignement du développement durable au niveau local. En parallèle, nous avons commencé à travailler directement au niveau des Ministères de l’Éducation pour améliorer les programmes au niveau national, une démarche qui est en train de porter ses fruits dans nos trois premiers pays (le Maroc, la Turquie et le Ghana) au travers d’un programme que nous avons monté avec des chercheurs d’universités locales pour travailler à la refonte des programmes nationaux.
Nous avons depuis lancé trois promotions de professeurs ambassadeurs, avec 6,800 professeurs dans 89 pays. Nous avons reçu le soutien officiel de Ban-Ki Moon, lancé un programme avec l’UNESCO, et nous avons passé notre objectif du million d’élèves impactés l’an dernier.
Que retenez-vous de cette aventure hors du commun ?
L’impact extraordinaire qu’il est possible d’avoir lorsque l’on arrive à créer les bons outils, et la force de l’énergie des jeunes pour changer le monde. Il n’y a pas d’âge pour s’engager, construire et avoir un impact. Pour l’anecdote, quand nous avons lancé le recrutement de nos 100 premiers ambassadeurs, nous avons reçu plus de 4 000 candidatures de jeunes qui voulaient s’engager pour enseigner le développement durable.
Et demain, comment envisagez-vous la suite de votre parcours personnel ou professionnel ?
Après 4 ans dans le développement durable, je souhaite continuer à approfondir et travailler sur les écosystèmes digitaux, l’éthique de l’IA et plus largement, sur le développement durable et humain de la technologie, dans le monde professionnel et académique. Sur le plan académique, j’ai eu la chance d’intégrer la première promotion du Programme d’Excellence lancé par l’IÉSEG en 2019. Ce programme a pour but d’accompagner les étudiants qui souhaitent poursuivre leur parcours académique dans des programmes Post-Graduate, ce qui était mon cas, souhaitant approfondir mes connaissances en IA et en éthique.
Après un parcours d’admission de près d’un an (GMAT, recommandations, essays…) j’ai reçu ma lettre d’acceptation pour intégrer en 2024 le MBA de Stanford. Encore une fois, je tiens à remercier toute l’équipe du programme d’excellence : ce parcours n’aurait pas été possible sans leur inébranlable soutien. Tout au long de mon parcours ils m’ont permis de rêver, d’oser, ils m’ont mis à disposition les meilleurs outils de travail et m’ont aidée à ne pas abandonner.
J’aurais donc la chance de m’envoler pour Stanford en 2024 pour une autre aventure extraordinaire.