Diplômé d’une licence en Économie à la Sorbonne, Loukman BADIROU poursuit par un Master en Management et Ingénierie Commerciale en alternance à l’IÉSEG. Une expérience qui lui permet de travailler en tant que chargé d’affaires chez Adecco en parallèle de ses études. Quelques mois après sa sortie de l’École, il décide de tenter sa chance au Canada où il atterrit en janvier 2020. Il intègre Randstad un an plus tard et se voit confier le poste de Directeur Adjoint de succursale début 2023.
[Histoire de Diplômé] Loukman BADIROU : Canada, l’envers du décor
Chaque année, plusieurs milliers de Français décident de tenter leur chance au Québec. Les raisons de ces expatriations sont aussi multiples que les profils des candidats à une nouvelle vie. Pour Loukman BADIROU, diplômé du Programme Grande École en 2019, il s’agissait avant tout de gagner en indépendance et en maturité dès sa sortie de l’École. Deux années de test « pour voir » et advienne que pourra. Autant dire qu’il n’a pas été déçu du voyage puisqu’il réside toujours à Montréal. Retour sur trois années riches en apprentissages, sans langue de bois ni idéalisation : de quoi vous faire votre propre opinion si vous êtes tenté(e) par le « Canadian way of life ».
Pensiez-vous habiter un jour à Montréal ?
Je rêvais de vivre à l’étranger depuis toujours sans cibler de pays en particulier. Mon parcours universitaire à la Sorbonne suivi de mon Master en alternance à l’IÉSEG ne m’ayant pas laissé le temps de voyager, je me suis promis de le faire dès mes études achevées. Mon frère connaissait déjà les démarches pour immigrer au Canada et m’a aidé à faire ma demande de P.V.T. (Permis Vacances Travail). J’ai hésité entre Toronto et Montréal, mais j’ai choisi cette dernière pour son niveau de vie plus abordable et sa francophonie. J’y suis arrivé début 2020 avec l’envie d’avancer professionnellement et pour vérifier que cette région du monde était faite pour moi…
Trois ans plus tard, vous y êtes toujours. Qu’est-ce qui vous a séduit ?
Montréal est une mégalopole avec un esprit de « petite ville ». On ne peut pas dire que l’on se sente dépaysé en arrivant, ne serait-ce que grâce à la langue. D’un naturel sociable, j’ai rapidement fait de nouvelles rencontres, aidé par la bienveillance et l’ouverture d’esprit de la population. Il a bien entendu fallu s’adapter aux expressions locales, trouver de nouveaux repères, loin de ma famille et de mes amis, et s’habituer aux -20 voire -30 degrés en plein hiver. J’ai eu la chance d’arriver juste avant l’épidémie de COVID et de découvrir la ville sans les restrictions. Bien entendu, tout n’a pas été simple tous les jours, mais je peux dire aujourd’hui que je m’y sens vraiment à ma place.
Vous êtes désormais Directeur Adjoint de succursale chez Randstad Canada. Quel est le périmètre de vos missions ?
Je suis en charge d’une équipe de consultants en recrutement pour des postes temporaires en soutien industriel, c’est-à-dire en entrepôt. Cette spécialisation par domaine d’activité est un atout car elle nous permet d’offrir une véritable expertise aux entreprises qui nous font confiance. Nous intervenons sur trois territoires sur la zone de Montréal, de la prospection, aux rencontres sur sites, en passant par le processus d’entretien et le placement chez nos clients. Je gère également la performance de mon équipe, en lien avec les objectifs du groupe. Mes missions ressemblent à bien des égards à ce que je faisais en alternance pendant mes études à l’IÉSEG, ce qui m’a permis d’évoluer rapidement vers mon poste actuel.
Vous avez en effet travaillé en France avant votre départ au Canada. Quelles différences avez-vous notées entre nos deux mondes du travail ?
Premièrement, on commence plus tôt au Canada (aux alentours de 8h) mais on quitte le bureau moins tard. Cela ne sera jamais mal vu comme en France où l’on finit parfois par faire du présentéisme pour éviter les remarques. Ensuite, les vacances sont beaucoup plus courtes : deux à trois semaines en moyenne, ce qui laisse moins de temps pour voyager, par exemple. Sur le plan de la hiérarchie, j’ai le sentiment qu’on la ressent moins ici : les managers sont accessibles et accordent beaucoup d’importance à l’inclusion, à la diversité et à la santé mentale. Sans oublier l’importance de l’anglais (de nombreux postes sont bilingues) et un vrai sentiment de flexibilité sur bien des aspects.
Qu’entendez-vous par là ?
Cette flexibilité se retrouve notamment dans la périodicité des paies : on reçoit son salaire tous les quinze jours, ce qui permet de gérer ses finances autrement. Ensuite, il est plus facile et rapide de quitter son poste, mais aussi de se séparer d’un(e) salarié(e). À mon sens, cela simplifie les processus de recrutement et fluidifie les relations entre employeurs et collaborateurs. Enfin, le monde du travail au Canada est ouvert à la reprise d’études au cours d’une vie professionnelle. On la voit comme une manière de monter en compétences et il n’est pas rare de rencontrer des salariés qui suivent des cours du soir pour se perfectionner. Par contre, si je devais trouver un point commun, parmi bien d’autres, avec la France, je citerais l’importance du réseautage. Cela fait même partie des éléments indispensables lorsque vous postulez pour un job puisqu’on vous demande toujours les références de vos anciens postes.
Sur quels aspects du recrutement le Québec se distingue-t-il ?
L’une des premières différences concerne le CV. En France, il tient sur une page et on conseille d’ajouter une photo. Ici, on suggère de ne pas en mettre pour éviter toute discrimination, on invite les candidats à détailler leurs expériences professionnelles et compétences sur plusieurs pages, mais aussi à ajouter une rubrique avec ses références d’emploi. C’est une sorte de gage de confiance. Autre distinction de taille : en France, on se focalise sur le niveau d’études comme un prérequis pour atteindre un poste. Au Canada, on se concentre davantage sur la personnalité, le parcours, les envies et je me sens personnellement plus à l’aise avec ce type de fonctionnement. Le revers de la médaille est qu’un haut niveau d’études peut parfois impressionner les recruteurs qui craignent alors que l’on s’ennuie rapidement et que l’on quitte l’entreprise. J’ai pu le vérifier par moi-même : décrocher son premier emploi au Canada, dans son domaine, est parfois plus compliqué qu’on ne le pense. Il faut s’armer de patience.
Le Canada ne serait pas un véritable eldorado pour les diplômés des grandes écoles comme l’IÉSEG ?
J’ai toujours eu du mal avec la notion d’eldorado, tant le nombre de paramètres à prendre en compte est varié : son expérience, les rencontres et opportunités, ses propres attentes, mais aussi un facteur chance qu’on ne peut pas nier. Celles et ceux qui pensent que l’herbe est plus verte ailleurs peuvent être déçus. Bien qu’incroyable sur le plan humain, ma première année ici a été difficile sur le plan professionnel : j’ai dû faire preuve de résilience et de patience pour trouver ma place, créer un cercle d’amis et me faire au climat parfois extrême ! Néanmoins, comme dans de nombreux pays, on constate aujourd’hui une pénurie de main d’oeuvre post-pandémie qui a engendré des salaires à la hausse et la nécessité pour les entreprises d’être toujours plus flexibles pour attirer les meilleurs profils. Il y a de belles opportunités pour les diplômés IÉSEG, notamment dans le secteur informatique, la finance ou l’ingénierie, mais aussi pour les étudiants (stages et échanges universitaires).
Parcours
Cet article a été rédigé par Luna Créations pour le magazine IÉS #16, le magazine de IÉSEG Network, l’association des diplômés de l’École.