“Sand to Green” : révolution agricole dans les déserts !
Diplômé du Programme Grande École en 2015, Benjamin ROMBAUT a co-fondé une entreprise révolutionnaire dans le monde agricole : Sand to Green. Des bancs de l’École au désert marocain, il nous raconte sa mission à travers cette initiative peu commune.
Benjamin, peux-tu nous raconter la genèse de “Sand to Green” ?
“Sand to Green” est un projet qui a mis beaucoup de temps à mûrir : plus de sept ans ! Je suis très sensible aux problèmes environnementaux, et c’est notamment pour cela que j’ai suivi les cours en ligne de Jean-Marc JANCOVICI, professeur à l’école des Mines à Paris. Ces cours permettent de comprendre l’ampleur du problème global, en expliquant notamment le lien entre PIB et émissions de CO2. J’ai alors appris que l’agriculture représente près de 25% des émissions de gaz à effet de serre. Ce pourcentage m’a vraiment marqué car, pour moi, qui dit « agriculture », dit « photosynthèse », et donc captation de carbone.
Je me suis donc intéressé au pourquoi du comment l’agriculture produisait autant de CO2 malgré la photosynthèse qu’elle génère. C’est ainsi que j’ai découvert que ce pourcentage provenait en grande partie de la déforestation pour augmenter toujours plus la surface des terres arables. Je me suis alors demandé si nous ne pourrions pas plutôt transformer des terres arides en terres arables, et si ce processus serait rentable
J’ai lu de nombreux articles scientifiques sur les aspects techniques du projet, comme le dessalement de l’eau, l’agroforesterie, l’amendement des sols, l’agriculture dans le désert, etc… Et finalement, je me suis associé à Gauthier DE CARCOUËT, qui s’est formé aux enjeux de la biodiversité et de l’écologie à AgroParisTech, et à Wissal BEN MOUSSA, diplômée d’AgroParisTech et de l’IAV Hassan II, et originaire d’une grande famille d’entrepreneurs sociaux au Maroc. Elle était retournée au Maroc pour, justement, cultiver une parcelle de 20 hectares en plein désert.
Vous vous êtes beaucoup inspirés des oasis pour ce projet…
En effet. Dans l’imaginaire collectif, une oasis est une étendue de verdure arrivée un peu par magie en plein milieu du désert, grâce à une source d’eau. La vérité est un peu différente. En effet, la présence de l’oasis est possible grâce à une source d’eau jaillissant au cœur du désert, mais ces oasis n’existeraient pas sans l’Homme : c’est lui qui a créé et qui maintient ces étendues de verdure grâce à la culture depuis des millénaires. La plus vieille oasis a 7 000 ans et se situe en Arabie Saoudite. Cela montre que nous pouvons avoir un impact positif sur l’environnement, car les oasis ont une biodiversité très riche et sont conçues de manière très intelligente pour prospérer dans le désert.
“Sand to Green” cherche donc à révolutionner l’agriculture en utilisant une approche plus durable et en contribuant à la lutte contre le changement climatique ?
Exactement ! Notre mission principale, c’est de changer de paradigme sur l’agriculture. Là où, jusqu’à présent, l’Homme a cherché des terres arables dans les forêts, nous nous orientons vers la régénération des sols pour nourrir les femmes et les hommes de notre planète. Cela permet une agriculture plus saine et plus durable, tout en contribuant à la lutte contre le dérèglement climatique.
Pour ce faire, nous recréons des oasis en milieu aride, notamment en procédant au dessalement de l’eau de mer et de l’eau saumâtre. En créant ou en restaurant des écosystèmes dans ces milieux arides, nous tirons nos revenus de trois manières différentes. D’abord, grâce aux arbres fruitiers (dattiers, caroubiers, grenadiers, figuiers) que nous avons plantés. Ensuite, à travers la culture intercalaire : nous cultivons des plantes aromatiques et des céréales entre les allées d’arbres. Enfin, nous tirons aussi nos revenus des crédits carbones, dont le marché mondial a été lancée suite Protocole de Kyoto en 1997 puis renforcé par l’Accord de Paris en 2015 lors de la COP21.
La notion de rentabilité est très importante pour nous, car nous croyons fortement que ce sont les entreprises qui changent le monde aujourd’hui. De ce fait, nous avons aussi, au-delà de l’aspect environnemental, un impact social positif en créant de l’emploi. Pour le moment, nous sommes implantés au Maroc mais nous souhaitons lancer prochainement des projets équivalents en Espagne, en Egypte et au Moyen-Orient.
Quelle est votre ambition ?
Tout d’abord, nous souhaitons réussir à quintupler la taille de nos plantations, les faisant passer de 20 hectares à 100 hectares et plus. Cela demande du temps. Ensuite, nous aimerions nous franchiser afin de développer plus rapidement ce mode de fonctionnement vertueux et d’en faire bénéficier le plus grand nombre. Enfin, les principaux acteurs de l’agroalimentaire ont conscience désormais qu’ils agissent dans un environnement de plus en plus instable. Ils cherchent donc à sécuriser leur approvisionnement qui va devenir de plus en plus compliqué, et notre solution les intéresse beaucoup. Nous avons pour ambition de répondre à ce besoin.
Quelques chiffres-clés ?
Aujourd’hui, « Sand to Green » c’est 1 million de dollars de levée de fonds, 7 personnes employées, 20 hectares de terrain cultivés et surtout 650 hectares en vue pour notre prochain projet à venir !